« Ils fabriquèrent un monstre »
Plus de vingt millions de dollars furent alloués à un programme qui, en grande partie, est toujours secret (probablement plus en raison de la honte qu’il génère que de son importance). Victor Marchetti, à l’époque assistant spécial du directeur de la CIA, Richard Helms, se rappela par la suite : « […] ils incisaient le ventre du chat, inséraient des batteries, des câbles.
La queue était utilisée comme antenne. Ils fabriquèrent un monstre. Ils le testèrent encore et encore. Ils découvrirent que le chat quittait son poste quand il avait faim, alors ils ajoutèrent un câble pour l’en empêcher. Puis, ils furent enfin prêts. Ils l’emmenèrent vers un banc, dans un parc, et lui dirent : “Écoute ces deux hommes. N’écoute rien d’autre – ni les oiseaux, ni les chats ou les chiens – uniquement ces deux hommes.” […] Ils le firent sortir de la camionnette, mais un taxi passait par là et écrasa le chat. Et ils étaient là, assis dans la camionnette avec tous ces boutons, mais le chat était mort ! »
L’affaire fut un peu expliquée dans un mémorandum daté de 1967, « Avis sur les chats dressés ». Il est impossible d’avoir accès à l’intégralité du titre ou du texte, mais nous pouvons en lire suffisamment pour avoir l’impression que des fonctionnaires se sont efforcés de donner un tour positif à ce fiasco. « Nous nous félicitons qu’il soit en réalité possible… d’effectuer une action non spécifiée ; une chose inconnue est en soi une réussite scientifique remarquable ».
En d’autres mots, tout ça est très encourageant (même si trop vague). Quoi qu’il en soit, les rédacteurs arrivèrent à la conclusion que le programme serait impossible à mettre en pratique pour leurs « besoins hautement spécialisés ».